Inaugurée le 17 juillet à Beyrouth, l’exposition « Roofs of the Metropolis », soutenue par l’Unesco, se tient jusqu’au 31 juillet à l’atelier de reliure KOHAR. L’event de découvrir les tableaux de Maral Der Boghossian dont les couleurs chatoyantes subliment la capitale libanaise. Le tout dans un cadre exceptionnel – KOHAR Artisan Bookbindery – qui accueille pour la première fois un tel événement. Rencontre avec l’artiste et le lieu.
Éprise de Beyrouth, la peintre Maral Der Boghossian a été très touchée par l’explosion du port le 4 août 2020. L’appartement qu’elle occupe à Mar Mikhael a été dévasté, comme ce fut le cas pour nombre de Libanais. Et à l’instar de nombre d’artistes, elle a vu voler en éclats son atelier et les galeries qui avaient l’habitude de l’exposer dans le secteur de Gemmayzeh. Ainsi, le projet « BERYT » (Réhabilitation du logement à Beyrouth et relance des industries culturelles et créatives) de l’Unesco a-t-il offert un nouveau souffle à l’inspiration de Maral Der Boghossian. Comme l’accueil hors du commun des responsables de la Bibliothèque KOHAR, un lieu distinctive trop méconnu. Cet endroit magnifique, discrètement niché au cœur de la ville, constitue l’écrin parfait pour les toiles de cette peintre de la lumière qui oblige à un insigne regard sur Beyrouth. La rencontre de Maral avec KOHAR sonne comme une évidence : c’est l’heureux mariage d’arts distincts, mais complémentaires, qui s’unissent en une même beauté sobre et raffinée… une symphonie réussie.
Maral Der Boghossian : « “Roofs of the Metropolis” est mon inspiration depuis déjà 20 ans qui met en lumière les toits et les façades de “ma” Beyrouth, des deux côtés du fleuve, dans le voisinage de mon lieu de résidence et de celui de mes grands-parents. Quand j’avais 10-12 ans, je rêvais de villes enluminées dont je savais que toutes étaient Beyrouth. Je la voyais très optimistic, éclairée, avec ce soleil d’après-midi qui tape sur les façades, quand les couleurs deviennent roses, orange, et les ombres bleues, violettes, bleu gris.
Lorsque j’ai terminé mes études en arts plastiques, j’ai voulu reprendre ces visions de mon enfance et les peindre dans le however de les transmettre au spectateur. Cette ville sereine et calme que je distinguais ne correspondait pourtant pas à la Beyrouth toujours en guerre de mes jeunes années. Avec ma famille, régulièrement, nous devions fuir les bombardements, changer de logement, reconstruire notre maison.
Néanmoins, en peignant je ne pouvais, et ne voulais, montrer que ce que je percevais dans mon intérieur, dans mon âme, dans mon cœur, derrière la pupille de mes yeux : Beyrouth accueillante, calme, ensoleillée, sereine, méditative, silencieuse, poétique. Ce memento correspond à l’essence de cette ville. Il est la nostalgie de ces moments de paix entre les bombardements. Alors, nous sortions des abris pour aller dans la rue, découvrir la campagne, la beauté du Liban ; ces moments où je marchais avec ma mère ou ma grand-mère qui me tenaient la major. Mes oncles et tantes ont tous quitté le pays dans les années 1980 pour ne plus y revenir. Ils sont partis en Occident. Cette picture des façades que je contemplais pendant nos déambulations a très fortement imprégné mon cerveau.
Je pense toujours que nous sommes un peuple positif qui think about que la dévastation prend fin, qu’elle ne va plus se répéter. Mais en 2020, l’explosion du port a encore une fois apporté la destruction. Ce jour-là, avec ma mère et mes sœurs, nous nous sommes dit que cette fatalité ne cesserait jamais.
Aujourd’hui la guerre n’est pas à Beyrouth, mais elle gronde au Sud, et une partie du pays est complètement détruite. Que nous attend-il en 2025 ?
Au milieu des crises qui secouent le Liban, et peu après le décès de ma mère qui était artiste sculpteur, l’Unesco a eu l’initiative de lancer le projet “BERYT CCI” avec des donateurs comme la Banque mondiale, le Lebanon Monetary Facility, des ambassades de pays européens, ou encore l’Union européenne au Liban. Ils ont consacré des fonds pour raviver la vie culturelle de Beyrouth. Avec ma sœur Nanor qui est graphic designer, nous avons formé l’une des 92 entités sélectionnées pour recevoir des fonds consacrés aux artistes. Une vraie respiration !
Concernant le lieu dans lequel j’ai le privilège d’exposer, KOHAR Artisan Bookbindery, c’est un atelier où des livres sont restaurés et reliés d’une manière artisanale et traditionnelle. Quand j’ai visité cet endroit, j’ai été fascinée automobile la vue, à travers les fenêtres, correspond exactement au paysage urbain qui m’encourage. Est-ce qu’on peut utiliser cet espace comme salle d’exposition pour mes œuvres qui sont exactement similaires à ces toits que je vois depuis KOHAR Artisan Bookbindery ? Nous avons parlé avec les responsables et la réponse a été optimistic. J’étais ravie, d’autant que c’est une première !
Aujourd’hui, je contemple la beauté de KOHAR, je regarde mes tableaux, le paysage qui s’offre à nous par les fenêtres : j’admire combien tout va si bien ensemble ! Je suis très reconnaissante aux responsables de KOHAR – dont je connais l’amour de la perfection – d’accepter de se lancer dans cette aventure avec moi et de m’ouvrir leurs portes.
J’aime les ciels encombrés par les fils électriques et les toits hérissés d’antennes paraboliques. Là où la plupart des gens verront une ville désorganisée, un peu chaotique et trop bruyante, je perçois le silence, la méditation et l’élévation vers la sérénité.
En peignant ces façades, ces toits, je sens que je contribue à préserver l’identité de cette région. Si jamais six mois passent sans que je puisse peindre, absorbée par mes recherches, j’ai l’impression que ce paysage n’est plus en sécurité. En peignant, je suis sûre que je vais le préserver. Donc, tant que je suis vivante et tant que je peux peindre, mon message consiste à conserver cet environnement en en révélant la beauté à travers mes toiles. »
KOHAR : L’histoire start avec le tremblement de terre en Arménie en 1988. Madame Kohar Khatchadourian visite ce pays meurtri et y trouve beaucoup de misère. Elle demande alors à ses 3 fils de faire quelque selected pour venir en aide à la inhabitants.
En secret, ses enfants montent un orchestre symphonique et créent un conservatoire dans la ville de Gyumri dans le nord de l’Arménie. Ils le nomment KOHAR, « joyau ».
En 2002, ils font venir le groupe au Liban et invitent leur mère à voir « un groupe venu d’Arménie ». Elle découvre alors la réalisation de ses fils et son nom en lettres majuscules. La bibliothèque est lancée en parallèle. L’orchestre symphonique grandiose se produira jusqu’en 2015. Quant à la bibliothèque spécialisée dans les livres de chansons arméniennes, elle rassemble pas moins de 2500 ouvrages sur ce thème, allant des livres de chansons pour enfants à ceux du célèbre Komitas, en passant par les chansons propres au scoutisme ou encore aux partis politiques arméniens.
Mais au fil du temps, KOHAR s’est enrichie de livres rares, de dictionnaires anciens et d’ouvrages très diversifiés liés à l’histoire de l’Arménie. Et elle possède également un atelier de reliure et de restauration dont les machines aux couleurs vives affichent l’âge canonique de 100 ans.
En cost de ce lieu de savoir, de beauté et de mémoire, Garo Derounian s’efforce d’acquérir chaque jour de nouveaux trésors et de guider les chercheurs avides de connaissance.