– Commercial –
Près de cinq ans après l’explosion cataclysmique du port de Beyrouth le 4 août 2020, qui a tué plus de 235 personnes, blessé 6500 autres et dévasté des quartiers entiers de la capitale libanaise, la quête de justice reste un mirage. L’enquête, initialement portée par l’espoir d’une rupture avec l’impunité chronique du pays, s’est enlisée dans un bourbier de pressions politiques et judiciaires. Selon Al Quds Al-Arabi, les juges chargés du file ont subi des interventions incessantes pour clore l’affaire sans inculpations majeures, laissant les familles des victimes et la société civile dans une lutte acharnée pour la vérité. Où en est la justice aujourd’hui ?
Une explosion qui hante encore : le drame du 4 août 2020
Le 4 août 2020, à 18h07, une double explosion secoue Beyrouth, née d’un incendie dans un hangar du port où 2750 tonnes de nitrate d’ammonium étaient stockées sans précautions depuis 2013. La seconde déflagration, équivalant à une petite bombe nucléaire (1,1 kilotonne selon les consultants), rase des immeubles sur des kilomètres, tue 235 personnes, blesse 6500 et laisse 300 000 sans-abris (Banque mondiale, 2021). Les dégâts matériels atteignent 4 milliards d’euros, un coup dur pour une économie déjà en récession depuis 2018, avec un PIB en chute libre (33 milliards de {dollars} en 2023, Banque mondiale). Dès les premiers instants, la inhabitants pointe la corruption et la négligence de la classe dirigeante, accusée d’avoir ignoré des avertissements répétés sur ce inventory mortel.
L’enquête démarre rapidement, portée par le juge Fadi Sawan, remplacé en février 2021 par Tarek Bitar après des pressions politiques. Mais ce qui semblait être une likelihood de rompre avec l’impunité – une custom au Liban, où aucun responsable majeur n’a été jugé depuis la guerre civile (1975-1990) – s’est transformé en un feuilleton judiciaire marqué par des blocages systématiques. Aujourd’hui, en mars 2025, l’enquête reste au level mort, les familles des victimes oscillant entre colère et désespoir face à un système qui semble protéger ses élites.
Pressions sur les juges : un système verrouillé
Selon Al Quds Al-Arabi, les juges Sawan et Bitar ont été confrontés à une campagne orchestrée pour clore l’enquête sans inculpations majeures. Dès décembre 2020, Sawan inculpe l’ex-Premier ministre Hassan Diab et trois anciens ministres (Ali Hassan Khalil, Ghazi Zeaiter, Youssef Fenianos) pour « négligence criminelle », mais ils refusent de comparaître, invoquant leur immunité. Des recours en cascade – plus de 40 plaintes déposées contre Bitar entre 2021 et 2023 – suspendent l’enquête à plusieurs reprises, la dernière fois en décembre 2021. En janvier 2023, Bitar reprend ses travaux, inculpant huit nouveaux suspects, dont le procureur général Ghassan Oueidat et des officiers de sécurité, mais Oueidat contre-attaque en le poursuivant pour « usurpation de pouvoir » et libère tous les détenus liés à l’affaire, un acte jugé illégal par l’ordre des avocats de Beyrouth.
Ces pressions ne sont pas anodines. Le Hezbollah, dominant avec ses alliés (32 sièges au Parlement, 2022), a orchestré une campagne contre Bitar, l’accusant de partialité. Une manifestation armée en octobre 2021, organisée avec Amal, dégénère en affrontements avec les Forces Libanaises (7 morts, 32 blessés), illustrant la violence déployée pour intimider la justice. Al Quds Al-Arabi rapporte que ces interventions visent à éviter des inculpations qui pourraient exposer des responsabilités au sommet, notamment sur la gestion du port – un fief économique et stratégique où le Hezbollah est soupçonné d’avoir stocké des matériaux pour ses roquettes, une hypothèse relayée par des consultants indépendants mais jamais confirmée officiellement. Aoun, dans Asharq Al-Awsat, reste prudent : « Nous voulons la vérité, mais les situations politiques dictent le rythme. » Cette retenue soulève des doutes : peut-il affronter un système qui protège ses propres intérêts ?
Mobilisation des familles et société civile : un cri dans le vide
Face à ce mur judiciaire, les familles des victimes et la société civile se mobilisent sans relâche. Depuis 2020, le collectif des familles organise des marches mensuelles devant le Palais de justice, brandissant des pancartes : « Justice pour les martyrs du 4 août ». En 2025, leur mouvement s’intensifie : une manifestation le 15 février apparel 5000 personnes, selon les estimations locales, réclamant une enquête internationale sous l’égide de l’ONU – une demande appuyée par 300 ONG (Amnesty Worldwide, Human Rights Watch) en août 2023. « Nous sommes fatigués, mais nous n’abandonnerons pas », confie Rima Zahed, qui a perdu son frère, dans Asharq Al-Awsat. Tatiana Hasrouty, dont le père est mort dans l’effondrement des silos, ajoute : « Ils ont peur de la vérité parce qu’ils sont tous impliqués. »
La société civile, by way of des ONG comme Authorized Agenda, soutient cette lutte. « Bitar représente une menace pour l’impunité », notice l’avocate Ghida Frangieh, citée dans Al Quds Al-Arabi, mais elle avertit : « La confrontation sera impolite face aux interférences politiques. » Les familles ont remporté des victoires symboliques – en juillet 2024, la Haute Cour de Londres somme Savaro Ltd, liée à un Syrien proche d’Assad, de révéler ses propriétaires – mais au Liban, le blocage persiste. Les silos, partiellement effondrés en 2022 après un incendie, restent un mémorial brut, que les victimes veulent préserver, mais l’État, absent, laisse pourrir ce symbole.
L’affaire du port de Beyrouth : quelles leçons tirer du blocage judiciaire ?
Selon Al Quds Al-Arabi, l’enquête est bloquée par des pressions politiques visant à protéger une classe dirigeante accusée de négligence et de corruption. Bitar, malgré sa détermination – il inculpe 13 personnes entre 2020 et 2023, dont Diab et Oueidat – se heurte à un système verrouillé : le Parlement refuse de lever l’immunité des députés inculpés, le ministère de l’Intérieur bloque l’interrogatoire de généraux comme Abbas Ibrahim, et les forces de sécurité ignorent ses mandats d’arrêt. En 2025, aucun procès n’a débuté, et l’acte d’accusation de Bitar, prêt selon une supply judiciaire anonyme (Asharq Al-Awsat), dort dans un tiroir. « C’est une guerre contre la vérité », déplore Ibrahim Hoteit, porte-parole des familles, reflétant un sentiment d’abandon.
Conséquences politiques : une légitimité en lambeaux
Al Akhbar souligne les conséquences politiques de cette impunité persistante : la classe dirigeante, déjà discréditée par la crise économique (82 % de pauvres, ESCWA 2023), perd toute légitimité. L’explosion, imputée à la corruption – 2750 tonnes de nitrate stockées sans sécurité malgré des alertes dès 2014 – a accéléré l’effondrement institutionnel. En 2025, le gouvernement de Joseph Aoun et Nawaf Salam (68 sièges sur 128) tente de relancer la justice, mais les blocages persistent. Le Hezbollah, accusé par certains d’avoir utilisé le port pour ses activités militaires (hypothèse non prouvée), maintient son emprise, tandis que les Forces Libanaises exploitent la colère populaire. « L’impunité tue la confiance », notice Al Akhbar, prédisant une instabilité croissante – 15 manifestations majeures en 2024, 5 réprimées par la pressure (ONG locales).
Répercussions diplomatiques : un isolement grandissant
L’impunité a des échos diplomatiques, selon Al Akhbar. La communauté internationale, initialement solidaire – 300 tens of millions de {dollars} d’aide d’urgence en 2020 – se lasse. L’UE, qui a promis 1 milliard d’euros en 2024, bloque 80 % des fonds faute de réformes judiciaires. La décision de Trump en février 2025 de suspendre l’aide militaire et humanitaire (300 tens of millions de {dollars} annuels) reflète cette frustration : « Le Liban doit se débrouiller seul », a-t-il déclaré, citant l’inaction sur Beyrouth. La France, malgré deux visites de Macron en 2020, n’a pas poussé pour une enquête internationale, critiquée par Al Akhbar comme un « soutien ambigu » à une élite corrompue. L’isolement s’accentue – 10 pays ont réduit leurs échanges avec Beyrouth en 2024 (ministère de l’Économie) – laissant Aoun face à un défi diplomatique aussi pressant que domestique.
Leçons d’un fiasco : vers une justice hors du Liban ?
Le blocage judiciaire enseigne une leçon amère : la justice libanaise, noyautée par les politiques, ne peut enquêter sur ses propres élites. Les familles et ONG appellent à une mission internationale de l’ONU, une possibility rejetée par le gouvernement depuis 2020 pour « souveraineté ». Mais avec 235 morts et aucune inculpation en 2025, cette souveraineté semble un prétexte. « Sans pression extérieure, rien ne bougera », prévient Al Quds Al-Arabi. Aoun, dans Asharq Al-Awsat, reste confiant : « La vérité finira par émerger. » Pourtant, face à l’occupation israélienne, l’impunité interne et l’abandon worldwide, cette vérité risque de rester un cri étouffé dans les ruines du port.
– Commercial –